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Séminaire thématique

Pour une histoire transnationale des installations et des essais nucléaires

MSHP (USR 2003) – CRÉSAT (EA 3436)

Septembre 2019 – Juin 2020

Résumé

Le 17 mars 2017, l’Accord de l’Élysée signé par le Président de la République et le Président de la Polynésie française a prévu la création d’un « Institut d’archives, d’information et de documentation sur les essais nucléaires ». Il s’agit d’instaurer un climat d’apaisement entre l’État et la Polynésie française pour une gestion sereine de l’après-nucléaire. La décision, en 1996, de mettre un terme à trois décennies d’essais nucléaires français s’est concrétisée par le démantèlement du Centre d’Expérimentation du Pacifique (CEP) à compter de juillet 1998, sans régler la question des héritages matériels et symboliques de la nucléarisation de la Polynésie.

Le Centre de mémoire en cours de réalisation doit permettre aux Polynésiens de connaître ce passé : le choix, en 1962, des atolls des Tuamotu pour prendre le relais du site saharien où la France a tiré sa première bombe A ; les 193 essais atmosphériques et souterrains qui se sont déroulés à Moruroa et Fangataufa entre 1966 et 1996, décisifs pour la mise au point de la bombe H ; les conditions du démantèlement et les héritages du CEP.

De son côté, le gouvernement de la Polynésie française a sollicité la Maison des Sciences de l’Homme du Pacifique (MSHP) pour contribuer à la conservation de la mémoire du CEP et à la mise en lumière de ses enjeux historiques. La MSHP a retenu la double proposition formulée par le CRÉSAT (Université de Haute-Alsace) : écrire l’histoire des essais nucléaires en Polynésie française et mener des enquêtes de terrain pour enregistrer la mémoire orale des acteurs du CEP, qu’il s’agisse des vétérans polynésiens ou métropolitains, ou des populations civiles concernées par leurs fonctions ou leurs lieux de résidence. Le CEP était en effet constitué de sites de tirs (Moruroa, Fangataufa), de bases avancées (Hao, Mangareva), d’une base arrière à Tahiti, sans compter les stations, permanentes ou temporaires de prévisions météorologiques et d’analyse des retombées radioactives, mobilisant au total, sur l’ensemble de la période, des dizaines de milliers de personnes militaires et civils.

Le volet « Écrire l’histoire du CEP » du programme de recherche regroupe une quinzaine de chercheurs de plusieurs disciplines et spécialités : histoire de la Polynésie, de la stratégie nucléaire, de l’écologie, de l’Outre-mer et du militaire ; anthropologie de la Polynésie ; géohistoire des risques, géographie et histoire du Pacifique ; sociologie des processus de victimisation. L’ambition est globale : par-delà la focalisation sur les enjeux sanitaires, il s’agit de prendre la mesure de l’ensemble des conséquences du CEP, dans tous les domaines. Mais aussi, de déterminer ce qui dans la transformation rapide de la Polynésie française ne lui est pas directement imputable. Autrement dit, discriminer l’emprise des représentations qui font du CEP un agent historique déterministe. Dans une logique qui dépasse les oppositions binaires, centre/périphérie, émission/réception, dominant/dominé, il s’agit de documenter l’insertion accélérée de la PF dans la mondialisation à l’occasion du CEP.

Le projet a commencé par une cartographie des archives permettant de documenter l’histoire des essais français en Polynésie (Archives Nationales, Ministère des Affaires étrangères, Service historique de la Défense, Commissariat à l’Énergie Atomique, Archives territoriales de Polynésie française, archives des collectivités de Polynésie française, archives étrangères des puissances riveraines, archives privées, archives orales). Ce travail collectif s’accompagne de travaux doctoraux co-dirigés afin de favoriser des approches pluridisciplinaires et transnationales sur les circulations des idées et des militants anti-nucléaires entre la Polynésie, l’espace océanien et la métropole et la coagulation des militantismes anti-nucléaires civils et militaires en Europe.

Dans cet esprit, et parallèlement au programme de recherche, le CRÉSAT organise un séminaire ouvert au public à l’INALCO, Paris XIIIe : « Pour une histoire transnationale des installations et des essais nucléaires ». Ce séminaire ambitionne d’élargir l’étude du CEP grâce à une approche comparée (essais américains, britanniques, soviétiques) et transnationale (réception des essais français par ses partenaires européens, réseaux d’opposants régionaux, etc).

Les 7 séances de l’année 2019-2020 présenteront les travaux de chercheurs français et étrangers travaillant sur des installations nucléaires et les programmes d’essais anglo-saxons et soviétiques, mais aussi le CEP lui-même. Le séminaire sera l’occasion de faire connaître différentes approches de la fabrique de la dissuasion par le bas, en proposant une histoire fine des lieux, des places et des populations qui ont permis la construction des arsenaux atomiques. Et d’ouvrir la recherche française aux travaux déjà menés en ce sens depuis une quinzaine d’années (Holly M. Barker, Bravo for the Marshallese : Regaining control in a post-nuclear, post-colonial world, Thomson/Wadsworth, 2004 ; Hugh Gusterson, People of the bom: Portraits of America’s nuclear complex, University of Minnesota Press, 2004). Cette approche a notamment donné lieu à la publication cette année des ouvrages de Lindsay Freeman, The Atom bomb in me, Stanford University Press, 2019 et Becky Alexis- Martin, Disarming Doomsday: The Human Impact of Nuclear Weapons Since Hiroshima, Pluto Press, 2019.

Programme

  • 26 septembre : Frédéric Monier, Université d’Avignon, Centre N. Elias (UMR CNRS 8562), « L’annonce de la création du site de missiles à Albion : réaction de l’opinion et débats politiques, 1965-1969 ».
  • 8 novembre : Benoît Pélopidas & Nariman Shelekpayev (IEP de Paris) : « Présentation du programme Nuclear Knowledges et des travaux en cours sur les essais français et soviétiques ».
  • 27 janvier : Magdalena Stawkowski (University of South Carolina), « Les essais nucléaires soviétiques au Kazakhstan ».
  • [SÉMINAIRE REPORTÉ AU 23 JUIN EN VISIOCONFÉRENCE, 19:00 – 21:00] : Lis Kayser (Université d’Aarhus) « Les essais nucléaires en Polynésie française et l’impact sur les pratiques de pêche ».  Modalités de connexion à venir.

 

  • [SÉMINAIRE REPORTÉ A L’AUTOMNE 2020] 6 mars : Becky Alexis-Martin (Manchester), « L’héritage des essais nucléaires anglais dans le Pacifique »
  • [SÉMINAIRE REPORTÉ A L’AUTOMNE 2020] 9 avril : Rens van Munster (Danish Institute for international Studies), « Le programme RADIANT et les essais nucléaires dans le Pacifique. Le cas des îles Marshall ».
  • [SÉMINAIRE REPORTÉ A L’AUTOMNE 2020] 7 mai : Nicolas Badalassi (IEP Aix-en-Provence), « La France face à ses partenaires européens : la question de la dissuasion nucléaire et des essais dans le Pacifique, années 1960-1970 »

Infos pratiques

En période de crise sanitaire, les séminaires maintenus auront lieu en visionconférence.

Les séminaires se tiennent en temps normal à l’INALCO, de 18 à 20h, afin de permettre aux enseignants-chercheurs et  étudiants résidents en Polynésie d’y assister par visio-conférence.

Institut national des langues et civilisations orientales

salle 3.15

65, rue des Grands Moulins

75013 Paris

INALCO, Paris