9e Journées d’Histoire industrielle

Fleuves industriels

Colloque 

24 & 25 novembre 2022
Rouen

Appel à communications

Argumentaire
Argumentaire

La localisation d’activités industrielles le long des grands fleuves a été considérée comme une évidence du fait des facilités de circulation permises par ces cours d’eau. La longueur du fleuve était synonyme de possibilité de pénétration à l’intérieur des terres, pour le transport des marchandises et en particulier des pondéreux. Le débouché maritime, avec son estuaire et ses ports, ouvrait vers le grand large et une circulation mondiale des productions. Alors que l’histoire des ports a connu, ces dernières années, de profonds renouvellements (Marnot, 2011 ; Chaillou-Atrous, Klein, Resche 2016) et que l’histoire maritime s’est structurée (avec la Société française d’histoire maritime depuis 1980, l’intense activité du GIS d’Histoire maritime depuis 2005, devenu GIS Histoire et sciences de la mer, le Pôle d’Histoire maritime), l’histoire des fleuves est restée en retrait. Historiens et géographes se sont pourtant rencontrés depuis longtemps autour de cet objet, à l’image de la publication sur le Rhin d’Albert Demangeon et Lucien Febvre en 1935, ouvrage dans lequel aménagement, circulation et localisation des industries étaient interprétés conjointement.

La prochaine édition des Journées d’histoire industrielle a choisi de mettre l’accent sur les fleuves industriels, en privilégiant plusieurs axes permettant de concevoir -plus que de définir- ce qu’est un « fleuve industriel ». D’autres dimensions, hors de ces axes, peuvent parfaitement faire l’objet d’une réponse au présent appel à communications qui ne se limite pas aux seuls cas français.

  • Circulations. Les fleuves, conçus comme axe de communication, permettent les circulations des matières nécessaires à l’industrie ainsi que des produits industriels mais également des personnes. Le débouché maritime et l’accès à un arrière-pays ont justifié des aménagements (digue, canalisation partielle, creusement…). La concurrence et la complémentarité avec les autres modes de transport, au premier rang desquels le chemin de fer, impliquèrent de penser la localisation des industries en rapport avec ces circulations. Aménager les fleuves supposait le recours à des machines industrielles. En outre, ces circulations justifièrent le statut particulier des fleuves, tant en France (Haghe, 1998) qu’en établissant des organisations internationales en charge de la navigation sur des fleuves comme le Rhin et le Danube (Libera, Schirmann, 2017). Etudier ces circulations revient à interroger la part des flux dans la localisation des industries, que ce soit pour le transport de pondéreux (charbon, bois, minerais…), de produits volumineux (automobiles) mais également de personnes dans le cadre d’une industrie touristique (croisières fluviales, hôtellerie). Les remises en cause du dernier demi-siècle avec la « conteneurisation » du monde (Levinson, 2006) et l’attention portée à l’échelle mondiale n’ont pas fait disparaître les circulations fluviales.
  • Ressources. Nombreuses sont les industries grandes consommatrices de la ressource en eau (chimie, production d’électricité, raffinerie…). Si l’usage de la force hydraulique des fleuves fait bien partie du sujet, en particulier dans la permanence des usages et dans sa dimension technopolitique, illustrée en France par le Rhône (Pritchard, 2011) ou La Rance (Sonnic, 2021), les usages industriels de l’eau seront privilégiés à travers les systèmes de prélèvement et les régulations qui y sont associées. Le projet Nuclearwaters (https://nuclearwaters.eu/) est un excellent exemple des problématiques actuelles en la matière. L’industrie canadienne de l’aluminium sur le Saint-Laurent, les transformations du caoutchouc naturel au Brésil (Fordlândia), les aménagements de la Volga ou les ponctions de l’industrie chimique dans le Fleuve Jaune sont une invitation à des comparaisons internationales.
  • Environnements. L’approche environnementale des fleuves industriels a déjà donné lieu à des travaux remarqués sur le Rhin (Cioc, 2002). Dans le temps long, les fleuves ont été considérés comme des réceptacles logiques des déchets des sociétés, domestiques comme industriels, assurant une sorte d’évacuation naturelle. La conscience de ces pollutions est ancienne (Garcier, 2005) mais les régulations furent tardives en France (lois de 1964 et 1992) autour d’une métrologie de la qualité de l’eau et d’une forme de fétichisme de la station d’épuration. Le traitement des eaux industrielles est une histoire encore largement à écrire si l’on sort des cadres institutionnels pour se placer au niveau des entreprises et des usines. Conflits entre industriels et associations halieutiques, catastrophes industrielles médiatisées (« Tcherno-Bâle » de l’usine Sandoz en novembre 1986), agences de bassin, réglementation européenne (Bouleau, 2007) sont autant d’entrées possibles dans ce thème. Les pollutions ne sont toutefois pas les seules façons d’appréhender les rapports entre environnement et fleuves industriels. Les paysages (Réal, 2008), les projets de « renaturalisation », les risques de crues, les représentations artistiques comme les imaginaires peuvent tout autant être mobilisés.

Bibliographie indicative

  • Bouleau Gabrielle, La gestion française des rivières et ses indicateurs à l’épreuve de la directive cadre, thèse de doctorat, AgroParisTech, 2007.
  • Chaillou-Atrous Virginie, Klein, Jean-François, Resche Antoine (dir.), Les négociants européens et le monde : Histoire d’une mise en connexion, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2016.
  • Cioc Mark, The Rhine. An Eco-Biography, 1815–2000, Seattle, University of Washington Press, 2002.
  • Demangeon Albert, Febvre Lucien, Le Rhin. Problèmes d’histoire et d’économie, Paris, Librairie Armand Colin, 1935.
  • Garcier Romain, La pollution industrielle de la Moselle française. Naissance, développement et gestion d’un problème environnemental, 1850-2000, Thèse de géographie, Université Lumière Lyon 2, 2005.
  • Haghe Jean-Paul, Les eaux courantes et l’Etat en France (1789-1919). Du contrôle institutionnel à la fétichisation marchande, thèse de géographie, EHESS, 1998.
  • Levinson Marc, The Box. Comment le conteneur a changé le monde, Paris, Max Milon 2011 (2006).
  • Marnot Bruno, Les grands ports de commerce français et la mondialisation au XIXe siècle (1815-1914), Paris, PUPS, 2011.
  • Martial Libera, Sylvain Schirmann (dir.), « La Commission centrale pour la navigation du Rhin : histoire d’une organisation internationale », Fare Cahier, n° 13, 2017.
  • Pritchard Sara, Confluence: The Nature of Technology and the Remaking of the Rhône. Cambridge, Harvard University Press, 2011.
  • Réal Emmanuelle, Le paysage industriel de la Basse-Seine, Rouen, Service régional de l’inventaire de Haute-Normandie, 2008.
  • Sonnic Ewan (dir.), L’énergie des marées. Hier, aujourd’hui, demain, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2021.


Comité d’organisation

Le colloque est organisé par l’université de Rouen Normandie, l’université de Technologie de Belfort-Montbéliard et l’université de Haute-Alsace.

Conseil scientifique des Journées d’Histoire industrielle

  • Régis Boulat – Université de Haute-Alsace

  • Yves Bouvier – Université de Rouen Normandie
  • Jean-Claude Daumas – Université de Franche-Comté
  • Aziza Gril-Mariotte – Université de Haute-Alsace
  • Michel Hau – Université de Strasbourg
  • Laurent Heyberger – Université de Technologie de Belfort-Montbéliard
  • Pierre Lamard – Université de Technologie de Belfort-Montbéliard
  • Nicolas Stoskopf – Université de Haute-Alsace
  • Laurent Tissot – Université de Neuchâtel

Modalités pratiques

Conditions de soumission
Conditions de soumission

Les propositions sont à envoyer à yves.bouvier@univ-rouen.fr ; regis.boulat@uha.fr et laurent.heyberger@utbm.fr

Informations pratiques
Informations pratiques

Le colloque aura lieu les 24 et 25 novembre 2022 à Rouen.